Remontée fulgurante des taux en Turquie pour contrer une inflation hors norme : de 8,5% à 25% en trois mois

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Tunisie-Tribune (Remontée fulgurante des taux en Turquie) – La Turquie n’en finit pas de tenter d’éteindre l’incendie monétaire, après une dernière hausse des taux survenue il y a un mois. Ce jeudi, la banque centrale de Turquie a procédé à une hausse de ses taux bien plus forte que prévu, de 17,5% à 25%. L’objectif de l’institution bancaire est de prévenir un rebond de l’inflation (alimentée par l’excès de liquidités dans l’économie), toujours proche des +48%.

L’escalade est fulgurante. En juin, l’institution avait rehaussé ses taux de 8,5% à 15%, puis à nouveau en juillet (17,5%), soit la troisième hausse en trois mois.

« Le Comité a décidé de poursuivre le processus de resserrement monétaire afin d’établir le plus rapidement possible le cap de la désinflation (…) et de contrôler la détérioration du comportement des prix », indique la banque centrale dans son communiqué. « Des indicateurs récents pointent vers une hausse continue de la tendance sous-jacente de l’inflation », a-t-elle précisé.

Alors que les analystes anticipaient une hausse de taux de 250 points de base, rappelle Tatha Ghose, de Commerzbank, soit un taux directeur à 20%, ce nouveau relèvement est d’une ampleur inattendue. Il porte la signature de la nouvelle équipe économique turque entrée en fonction après la réélection fin mai : du président Recep Tayyip Erdogan : Hafize Gaye Erkan comme gouverneure de la banque centrale et Mehmet Simsek comme ministre de l’Economie.

Face à une inflation qui reste très élevée (aux alentours de 48%) et à la crise économique dont la Turquie peine à se sortir, le chef de l’Etat, pourtant défenseur des taux d’intérêt bas, consent pour l’heure à une hausse des taux.

Une politique de resserrement monétaire pour endiguer l’inflation

La nouvelle équipe chargée de l’économie de la Turquie s’est immédiatement lancée dans une nouvelle bataille contre l’inflation qui a atteint 85% sur un an en octobre dernier. Après deux précédentes hausses limitées du taux directeur en juin et en juillet, le président turc laisse finalement les coudées franches à la nouvelle gouverneure de la banque centrale et au ministre de l’Économie, estiment les analystes.

Dans les premiers mois de leur mandat, le duo d’économistes semblait préconiser une approche plus lente qui tente de restaurer la confiance du marché. Ils ont également imposé une série de mesures techniques visant à équilibrer l’économie et à réparer la confiance des consommateurs et des investisseurs étrangers turcs. « La banque centrale semble donner la priorité à la constitution de réserves et à l’amélioration des déséquilibres extérieurs », a affirmé Muhammet Mercan, économiste en chef de la banque ING.

Avec cette hausse des taux de 17,5 points, le duo semble être passé à la vitesse supérieure. Toutefois, le combat contre la hausse des prix et loin d’être terminé. Le taux d’inflation annuel de la Turquie a atteint 47,8% en juillet, en partie grâce aux milliards de dollars de dépenses sociales effectuées par le président Erdogan pendant sa campagne électorale. La banque centrale s’attend à ce que le taux d’inflation annuel atteigne 60% entre avril et juin 2024.

« Il reste un écart important entre le taux directeur et l’inflation actuelle et attendue », a estimé Muhammet Mercan.

La livre turque repart à la hausse

Après la hausse du taux directeur bien plus forte qu’attendu, la livre turque a bondi de 6%. Vers 13H30 GMT (15H30 à Paris), la livre turque bondissait de 5,36%, à 25,814 livres pour un dollar, peu après avoir frôlé les 7% de hausse. La devise renoue ainsi avec ses niveaux de fin juin.

« Les marchés turcs acceptent très bien la hausse des taux de la banque centrale aujourd’hui. Hafize Gaye Erkan et son équipe sont vraiment impressionnantes », a jugé Timothy Ash, économiste de BlueBay Asset Management.

Après les élections présidentielles, Ankara a réduit son dispositif de défense de la livre turque, artificiellement soutenue des mois durant par des ventes massives de devises pour lui éviter de dévisser. La monnaie a perdu le quart de sa valeur face au dollar depuis fin mai. Le ministre de l’Économie et la gouverneure de la banque centrale du pays ont permis à la livre turque de commencer à se déprécier par rapport au dollar dans le but d’alléger la pression sur les caisses de l’État. La dépréciation quasi-continue de la monnaie turque l’avait emportée début août jusqu’à son plus bas historique, à près de 27,307 livres pour un dollar.

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